Dans la forêt du Franc al-ôd

Au cœur du Franc al-ôd, certaines forêts possèdent une respiration qui dépasse l’entendement.
Je marche sous ces grands arbres comme on avance dans un temple ancien,
où chaque tronc forme une colonne
et chaque ombre un passage vers une vérité plus profonde.

La mousse embrasse les écorces avec une tendresse de vieille alliée.
Elle s’étire en nappes lumineuses,
offrant au regard un vert qui pulse doucement,
comme si la terre exhalait sa mémoire à travers les pores du bois.
L’air entier garde le calme des lieux qui ont beaucoup vu
et qui accueillent encore.

À travers les branches épaisses,
une lueur discrète suggère un espace plus vaste,
un autre monde juste derrière la brume.
Ce voile léger crée une distance,
non pour éloigner,
mais pour attirer l’esprit vers une écoute plus profonde.
Dans cette lumière adoucie,
le territoire semble chuchoter :
« Approche-toi encore, avance avec soin,
car chaque détail porte un sens ancien. »

Le sol, couvert d’aiguilles et de feuilles brunies,
offre au pied une douceur qui rappelle la marche dans un souvenir.
Chaque pas devient une immersion,
non dans la terre seule,
mais dans une couche intime de l’existence.
La forêt accueille tous les états du marcheur :
les certitudes, les hésitations, les élans, les silences.
Elle incorpore ces mouvements
comme une vaste respiration qui englobe toutes les autres.

Ici, l’espace se respire intérieurement.
Le souffle puise dans la profondeur du paysage,
et cette manière d’inspirer la forêt
élargit le cœur avec une lenteur majestueuse.
De cette ouverture naît une compassion simple,
une compassion qui se déploie comme la lumière du matin
sur l’écorce humide des chênes massifs.

La forêt du Franc al-ôd révèle ainsi
une vérité que seuls les marcheurs patients rencontrent :
le monde extérieur et l’espace intérieur
se reflètent l’un dans l’autre,
comme deux surfaces d’eau qui vibrent au même mouvement.
Alors, la marche cesse d’être un déplacement
et devient un approfondissement —
un retour vers la zone la plus vaste du cœur.

Dans cette profondeur,
la forêt entière se transforme en un guide silencieux.
Elle invite à la clarté,
à la compassion,
à la présence pleine.
Et l’on comprend soudain
que le territoire affranchi vit aussi en soi,
avec ses arbres, ses brumes, ses espaces ouverts,
et cette lumière intérieure
qui, à chaque pas,
cherche son propre passage vers le large.

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