Élargir le cœur

Dans le Franc al-ôd, j’avance comme on traverse une vieille amitié.
Le sol respire, les arbres veillent,
et l’air porte une paix que l’on entend seulement lorsqu’on marche sans hâte.
À chaque pas, un espace nouveau s’ouvre en moi,
et le souffle circule avec la liberté d’un ruisseau qui retrouve son lit.

Je m’arrête au bord d’un vieux pin,
puis je respire profondément.
En inspirant, l’espace intérieur s’élargit,
comme si la forêt entière entrait dans ma poitrine.
Cette manière de respirer — vaste et simple —
dissout toute étroitesse,
et une douceur claire se lève depuis le centre du cœur.
De cette clarté surgit un sentiment immense :
une compassion large comme un horizon de montagne.
Respirer l’espace intérieurement
fait naître une grande compassion pour tous les êtres sensibles,
une compassion tranquille, stable,
telle une lumière qui gagne en force à mesure que le jour avance.

Alors je contemple la bonté discrète qui circule en chaque être.
Elle brille en eux comme une braise ancienne
que même les froids les plus rudes ne peuvent éteindre.
À chaque respiration, je me réjouis de cette lumière commune.
Beaucoup courent vers des éclats brillants —
pouvoir, gain, prestige —
et leur course ressemble aux remous d’un lac battu par le vent.
Leur fatigue touche le cœur
et révèle une grande vulnérabilité.
Pourtant, sous leurs pas agités,
une source claire demeure prête à jaillir.

En marchant encore,
je sens un désir sincère de soutenir toutes ces vies
qui cherchent la joie sans toujours trouver le bon sentier.
Le vent apporte leurs espoirs,
la terre porte leurs traces,
et la forêt garde leur mémoire.
Dans cette écoute,
je perçois un lien profond entre eux et moi,
un fil invisible qui réunit tous les souffles vivants.

La compassion grandit alors comme une rivière au printemps.
Elle coule sans effort,
elle cherche son chemin,
elle enveloppe tout ce qu’elle touche.
Une urgence douce s’élève —
une invitation à éclairer les routes intérieures,
à offrir un peu de chaleur,
à accompagner chaque être vers la clairière
où sa propre lumière peut respirer librement.

Ainsi se déroule la marche dans le Franc al-ôd :
un pas, un souffle, une ouverture.
Et dans cette ouverture,
la compassion se déploie
comme le jour qui s’étend sur la forêt entière.

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