
J’ai laissé au refuge
Tout mon matériel de pêche :
Mouches, avançons, Soie et bambou.
Je les ai accrochés au mur Est.
Au milieu de la Naspidwi
Sans cet attirail
Le vent filant sur mon visage
J’ai ferré l’omble merveilleux.

J’ai laissé au refuge
Tout mon matériel de pêche :
Mouches, avançons, Soie et bambou.
Je les ai accrochés au mur Est.
Au milieu de la Naspidwi
Sans cet attirail
Le vent filant sur mon visage
J’ai ferré l’omble merveilleux.

Toutes ces années à errer
Dans ces torrents incessants
Prisonniers de ces indomptables remous
Ensorcelé par ces sirènes-illusions
Puis au milieu de cette tourmente
Je me suis isolé dans la Nature
Afin d’établir une distance
Entre moi et ces avidités luxuriantes
Espérons que le vent qui hurle au travers les longs pins
M’exaltera sans jamais me rendre fou
Souhaitons que mes assises soient
Bien ancrées profondément dans la Naspidwi

Lorsque je contemple le ciel
Je vois que tout se transforme
Les nuages bougent et changent
Jamais fixe
Ni deux fois la même forme
Nuage ?
Le deux pieds dans la Naspidwi
Je vois que tout se transforme
L’eau bouge et changent
Jamais fixe
Les flots n’ont jamais la même forme
Rivière ?
En train de pêcher
Je sais que tout se transforme
Ma soie devant derrière
Jamais fixe
Ni deux fois la même forme
Soie ?
Dans mon esprit
Je sais que tout se transforme
Mes pensées vont et viennent
Jamais fixe
Mon esprit n’a jamais la même forme
Esprit ?

Au coeur de la Naspidwi
L’omble s’épanouit
Plein de vie dans ses flots
Il s’agite en ses allures matinales
S’extirpe en s’arc boutant
S’éclaboussent au soleil
Puis se repose au tréfonds
Au coeur de la Naspidwi
Je m’épanouis
Pleins de vie dans ses flots
M’agitant en mes allures matinales
Extirpant ma soie en m’arc boutant
Je m’éclabousse devant, derrière
Puis me repose au tréfonds
Qui ferre qui?

Le lit de la Naspidwi est le soutien de ses eaux
Les flots de la Naspidwi façonnent son lit.
Sans cesse ils se transforment l’un l’autre.
Ils sont indépendants tout en étant en complète dépendance
Et pourtant!
Les eaux sont les eaux
Le lit est le lit

C’est en amont que la Naspidwi prend sa source
Née d’un simple filet lui-même issu des eaux du ciel.
D’abord ruisseau, puis jeune rivière, elle s’allonge en aval
S’étend en amplitude et en grandeur
Pour rejoindre et se jeter dans un fleuve
qui à son tour s’abandonne dans un océan infini.
Elle se définit par ses eaux et son chenal
Et pourtant ni ses eaux et ni son lit ne sont jamais les mêmes.
Son ruisseau n’est pas la jeune rivière, ni son embouchure.
Parfois filet, torrent, cascade, rapide, fosse ou chute
Sa forme varie, ses eaux jamais les mêmes.
Elle est ou elle n’est pas?
À quel endroit se trouve donc cette rivière?
Dans l’empreinte qu’elle laisse en moi
lorsque je pêche dans l’affluent qui m’exalte.

En ce moment, au coeur de la Naspidwi
Je suis la mouche, la soie, le bambou
Je suis l’avant, l’arrière, le lancer
Je suis la rivière, son lit, les rochers
Je suis ses flots, ses rapides et une bulle sur l’eau qui éclate
Je suis l’omble, l’éphémère, la libellule
Je suis la forêt, le chant des oiseaux, le vent dans les feuilles
Je suis le ciel, les nuages et l’espace
Je suis, je suis, je suis
Et pourtant je ne suis pas!

La pêche ultime. Quand on est débutant, on veut absolument attraper un poisson, puis vient le temps où on veut épater la galerie (ou se rassurer soi-même), et on aligne les prises comme les perles sur un chapelet, le plus de poisson possible ! C’est la période qu’auparavant on appelait »les remplisseur d’éviers », puis que la coutume était le « poisson pris, poisson frit » ! Puis avec le temps le pêcheur évolue, ils se concentre sur le poisson mahousse, la mémère qu’il aura ferré, bref il cherche la plus grosse. Toujours dans une recherche de trouver une assurance quelconque, essayer de se surpasser en domptant la nature, indomptable, le sentiment de toute puissance réside là. Puis, nous franchissons encore une étape, celle du plaisir que l’on prend à faire attraper du poisson à d’autres. On entre alors dans une période de communion totale avec la nature et l’espèce humaine, le don de soi pour le bonheur des autres, qui aujourd’hui ne passe plus par « rapporter une truite pour le déjeuner », mais plutôt comment les attraper, les relâcher et s’assurer qu’elles retournent dans un environnement sain.
Là où l’on prend tous une gifle, pour ne pas dire une bifle c’est quand on voit ce film de Reno Boyd où le bonheur n’est pas d’attraper le poisson mais de le leurrer et ce avec des mouches non pas sans ardillons mais sans hameçons ! La truite est le meilleur compagnon de jeu et le but ultime de la pêche moderne est aujourd’hui de satisfaire l’homme dans sa capacité à imiter ou à vivre en accord avec la nature, mais surtout tel un véritable jeu, à leurrer les poissons, qu’il ne consomme plus, mais où il n’a donc plus aucune raison de les blesser en les attrapant avec un hameçon, et ce simple geste suffit à agir comme un neurotransmetteur du plaisir, une sorte de dopamine !
Donc, je suis resté héberlué en regardant ce pêcheur mécaniquement couper les hampes de ses hameçons avec une pince, pêche ultime vers laquelle nous aspirons ? Je veux l’épanouissement que semble connaitre cet homme, de la même manière que j’avais été subjugué par Lee Spencer sur l’Umpqua, qui leurrait lui aussi les Steelheads avec des hameçons dont il coupait la hampe, pour ne pas les blesser…
Oui, je sais, le chemin est long, en attendant regardez ce film, c’est une leçon de zen.
« Je lance ma mouche, je ne pêche pas ».
source: http://www.lemouching.com/2017/05/ultimate-flyfishing/


Qui a déjà vu une mouche voler avec un hameçon? Moi jamais!

Les sons de la Naspidwi dans la vallée
sont de longues et vastes prières.
La forme des montagnes sont des corps de pureté
Toute ma vie je les ai entendu.
Comment aujourd’hui pourrais-je les transmettre?